dimanche 13 mars 2005

Nacho Duato / Bach (Théâtre du Châtelet - 12 Mars 2005)

A la tête de la "Compañia Nacional de Danza", Nacho Duato propose une oeuvre en deux parties, sur des musiques de Johann Sebastian Bach, intitulée "Multiplicité - Formes de silence et de vide".
Le but de "Multiplicité" est sans doute de lister un certain nombre de visages différents de la musique de Bach, qui se révèle ici tour à tour religieuse, lyrique, romantique, ou minimaliste répétitive. Autant de sketches successifs, que la danse vient illustrer, principalement par des pas de deux ou des figures de groupe. Si les couples s'en sortent bien, dans une écriture assez classique mais très soignée (pour une fois, je n'ai pas oublié mes jumelles, et je suis avec délectation et en gros plan tous les portés et entremêlements), les groupes doivent se contenter de passages vraiment peu inventifs, il me semble inspirés de Mats Ek, mais sans la violente charge cynique que ce chorégraphe suédois met dans l'exploitation de la laideur : sauts en grenouille, déhanchements du cou, gestuelles en silhouettes égyptiennes, ce vocabulaire répétitif reste nimbée d'une élégance de mouvements qui en anesthésie l'insolence.
On a donc une suite de tableaux agréables, parfois drôles, mais tous un peu vain, n'apportant pas grand-chose ni à la musique, ni à l'art chorégraphique en général. La scène la plus originale se joue sur le prélude de la première suite pour violoncelle, où Alejandro Alvarez, déguisé en Bach jeune, joue de l'archet sur tout le corps de Marina Jimenez, qui se contorsionne très suavement. Mais l'apparence très jeune, presque enfant, de la danseuse, donne à la pièce un relent douteux, qui n'est clairement pas maîtrisé par le chorégraphe, et quand la même idée est reprise pour des danseurs transformés en pianos, on peut s'attrister du manque général d'idées fortes.
La seconde partie "Formes de silence et de vide" s'attache à la mort de Bach. Le ton est donc plus sombre, mais guère plus novateur. Pour le final, sur bien sur la fugue inachevée de l'Art de la Fugue, les danseurs montent lentement le long de rampes en arrière-plan, tandis qu'un drap lentement tournoyant, évoquant par un effet d'éclairage très réussi l'écoulement d'un sablier, se fera arracher par une danseuse personnifiant la mort, sur les dernières notes B A C H, sur lesquelles tous les danseurs se figent, avant que Duato Nacho ne conclut cette oeuvre par la redite de l'introduction, un solo sur l'aria des "Variations Goldberg".
Pour un public peu connaisseur en chorégraphie contemporaine, cela a pu être un bon spectacle, agréable puis émouvant, et la salle, bien qu'à moitié vide, a réservé de chaleureux applaudissements à la troupe. Mais j'ai trouvé tout ça assez trivial, et peu mémorable.

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