lundi 13 mars 2006

Jean-Guihen Queyras - Suites pour violoncelles de Bach (Cité de la Musique - 12 Mars 2006)

Johann-Sebastian Bach - Suites pour violoncelle BWV1007 à BWV1012

Trois concerts successifs seront nécessaires : suites 1 et 4 à 15h, 3 et 5 à 16h30, 2 et 6 à 18h. Je ne me risquerai pas à commenter l'oeuvre elle-même. Restons-en à l'interprétation de Jean-Guihen Queyras.
Ce qui frappe dès l'abord, c'est la respiration très naturelle qu'il insuffle aux tempi ; ni corseté dans des rythmes de danse trop rigides, ni démontrant une liberté par des choix hasardeux ou spectaculaires, il laisse du champ libre pour que s'exprime la musique, que ce soit la joie de la danse, la souffrance interiorisée, la ferveur recueillie, l'intensité de la foi. Jouant sans partition, les yeux presque toujours fermés, le visage parcouru d'émotions, il a le geste ample, mais d'une précision formée à l'école contemporaine. Il utilise beaucoup les variations d'intensité pour structurer le discours, aussi bien au niveau micro (phrase répétée plus faiblement, comme en écho) que macro (des gigues finales qui s'arrachent en crescendo). Son violoncelle, un Gioffredo Cappa de 1696, est comme un partenaire, fidèle jusqu'à la dernière suite, où le réaccordage semble le faire un peu souffrir (mais je fatiguais aussi ; et la suite 2, donnée juste avant, semblait déjà un peu longue - le dynamisme, l'élan, le constant équilibre entre l'allure vivifiante des danses et les moments plus intensément spirituels, s'y ralentissant du coté sombre).

Les pré-échos

Avant chaque suite, Queyras joue une courte pièce, commandée pour l'occasion, supposée posséder un lien avec la suite parraine, qu'il enchaîne sans interruption, comme une sorte de sas temporel. Le parti-pris est curieux, mais fonctionne, et la difficulté technique de ces introductions ajoute encore à la gageure de l'entreprise. Brève revue de détail.

Ivan Fedele - Arc-en-ciel
Beaucoup de notes très aigües, obtenues en carressant à peine les cordes, et des harmoniques naturelles ; belle couleur.

Gilbert Amy - Ein... Es Praelidium
Pièce très déstructurée, collage de gestes, un rythme ici, une arpège là, des pizzicati lourds et vibrants.

György Kurtag - Pièces brèves
Mauvais élève qui n'a pas rendu sa copie à temps ! Du coup, trois miniatures seront jouées ("Az Hit", "Pilinsky Janos : Gérard de Nerval", "Arnyak"), des concentrés de méditation sur la mort ou la foi.

Misato Mochizuki - Pré-écho
Cette jeune compositrice japonaise multiplie les difficultés techniques et les variations de climat ; beau et spectaculaire, mais elle devra se tempérer...

Jonathan Harvey - Pré-écho
Il a trop écouté le début de "Tout un monde lointain" de Dutilleux ! Même mystère et forme d'éveil, qu'il prolonge par une rapide trille.

Ichiro Nodaïra - Enigme
De nouveau une pièce techniquement ardue (décidément, ces japonais...), où domine l'aigu (normal, en intro à la 6ème suite et sa corde supplémentaire).

En bis, il jouera une pièce de Philippe Schoeller, elle aussi écrite pour l'occasion, pleine de délicatesse et de brillance, il me semble.

Mise à jour : Dans le Pot-Pourri, un peu, beaucoup, beaucoup trop de violoncelle. Un parcours des six suites, d'abord par Pierre Fournier, d'une maîtrise absolue, puis par Paolo Beschi, sur violoncelle baroque, audacieux et extravagant, mais par moments complètement vide. Autour, des oeuvres jouées par Queyras, seul ou accompagné ... de six violoncelles.
Bonus : Sur Flickr, quelques photos de la Cité de la Musique.

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