dimanche 24 septembre 2006

Lindon Sinfonietta - Warp Records (Cité de la Musique - 23 Septembre 2006)

Etrange atmosphère, à la Cité ! Dehors, fuyant la pluie, réfugiés sous la véranda ou contre les murs, des groupes de pique-niqueurs finissent leur repas en attendant sans doute le feu d'artifice. Dedans, une petite foule se presse pour des billets de dernière minute, certains attirés par le Sinfonietta, d'autres par Warp ; l'objectif d'un public "cross-over" semble atteint.
Dans la salle, un écran géant propose une vidéo sur le "Poème symphonique pour cent métronomes" de Ligeti, puis un orateur vient présenter, en english only, la soirée, en auto-célébrant la formidable ouverture et le succés international... Puis, enfin, la musique commence.

Conlon Nancarrow - Etude n° 7


La pièce, écrite pour piano mécanique, est ici transcrite pour ensemble. Sa complexité polyrythmique en est diminuée, pour donner une atmosphère agréable et variée, sorte de promenade bucolique, qui servira pour la suite du concert, mais ne rend pas intégralement hommage au génie bricoleur et à sa radicale façon minimaliste, de Nancarrow.

John Cage - Sonates


John Constable ponctuera à 3 reprises le concert de sonates pour piano préparé. Excellente interprétation, entre détachement mystique et engagement poétique (on l'inverse ...), exotisme balinesque et mélodies exigües. La charge révolutionnaire des clous et des trombones a totalement disparue, l'oeuvre est devenue un grand classique. Ce seront les meilleurs moments de la soirée.

Boards of Canada, Aphex Twin, Squarepusher


Tiens, pas de Autechre ! Auraient-ils refusé ? Ou sont-ils inadaptables ? Le coeur du concept de ce concert, c'est de retranscrire pour le London Sinfonietta des morceaux issus de ces leaders du label techno Warp. Le résultat n'est pas désagréable, mais assez profondément superficiel. Donc sans intérêt. Le Williams Fairey Brass Band reprenant des standards d'Acid Music possédait une authenticité, que cet exercice assez intellectuel et vain ne possède guère. Il est juste étrange que l'idée n'ait pas déjà été exploitée par le Kronos Quartet. Comme c'est du travail bien fait, c'est amusant, parfois intéressant. Mais dispensable au possible.

Mira Calix - Nunu


Le cas est différent, parce que Mira Calix était sur scène, armée de son clavier et de ses ordinateurs. Le début de la pièce, avec son traitement de triturations des cordes, est du "Lachenmann for the masses", même gamme de sons impurs, mais ici mis en boucle, spatialisés, accumulés selon des procédés bien confortables, qui nous embarque, dans un cargo craquant de toutes parts, dans une nuit remplis de cris d'animaux, dans une jungle toute crissante et glapissante. Lorsqu'elle décide d'ajouter de vraies notes à son édifice sonore, elle le noie sous une vague bien banale, qui détruit la force initiale.

Steve Reich - New York Counterpoint


Pour clarinette et bande, en mouvements "fast - slow - fast" (arrgh !), inutile de répéter que Reich finit par m'être insupportable. Comme plusieurs morceaux de ce concert, et comme fort souvent pour Reich, le fait que le son de la clarinette, pour être mieux fondu avec la bande, vienne des hauts-parleurs et non d'une diffusion directe, n'aide pas. De plus, toutes ses oeuvres (à part Cage, ouf !) sont accompagnées de clip vidéo, parfois complètement ratées, comme ici ou pour Nancarrow, parfois très réussies, comme pour Boards of canada ou Mira Calix. Mais cette surcouche renforce la dimension décorative de la musique, simple élément d'un dispositif qui déconcentre. La peur que le public s'ennuie ...

Charles Ives - The Unanswered Question


Morceau génial, ici joué version quintet à cordes, avec la trompette interrogative dans le public en hauteur, excellent (clip inutile - tant qu'à mettre des images, l'extrait de "The Thin Red Line" où passe cette musique, avec le héros errant ahuri dans un après-massacre qu'il refuse, ne peut être dépassé).

György Ligeti - Concerto de Chambre


Je n'aime pas vraiment cette musique, sans savoir pourquoi. Peut-être parce qu'elle est trop "entre", ni vraiment statique ni vraiment hystérique, ni vraiment grinçante ni vraiment émouvante, ni vraiment revigorante ni vraiment désespérée. Interprétation correcte, sans plus.

Radio : Comment, on parlerait du label Warp, sans pouvoir écouter d'Autechre ?! Voilà qui serait une anomalie guère pardonnable ! Aussi proposé-je une sélection toute personnelle dans la discographie de ce groupe fondamental.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Je serais globalement moins sévère.
Bon, j'aime bien Reich (désolé), déjà ça aide un peu.
Des retranscriptions des artistes Warp, je retiendrai surtout le Board of Canada. L’essai sur Aphex Twin n’était pas mal mais les deux adaptations de Squarepusher, à mon avis, sans aucun intérêt ; c'était d'ailleurs dommage de finir le concert avec elles.
Pour Mira Calix, j'aurais presque le point de vue inverse : j'ai été d'abord un peu sceptique sur le début de son set (une musique électro-acoustique sans grande imagination) puis peu à peu embarqué par cette progressive mise au point (du film comme de la musique, sans doute le seul cas de la soirée où l'association sons-images semlait véritablement pensée) pour finir complètement emballé.
Enfin, sur les à cotés, encore plus étrange que le début de soirée, c'est la sortie avec cordon de pompiers pour surtout éviter que l'un d'entre nous ne mette le pied dans l’eau (mon dieu le terrible danger) qui m'aura le plus étonné.