dimanche 24 janvier 2010

Mantovani Boulez (Cité de la Musique - 23 Janvier 2010)

Bruno Mantovani - Le sette chiese

Voilà encore une partition qui se métamorphose en concert. J'ai plusieurs fois écouté et beaucoup aimé le disque Kairos / Sirènes, puis l'ai laissé reposer. J'ai du coup l'impression ce soir de découvrir l'oeuvre. Mais l'impression laissée par le disque est confirmée : c'est un chef d'oeuvre. Les alliages instrumentaux sont peaufinés sans être extravagants, la matière orchestrale est diverse mais sans partir dans tous les sens. Le livret, signé par le compositeur, livre des informations assez stupéfiantes : 6 mois de travail pour écrire 40 minutes lui semble long, et il trouve cette pièce sobre, avec un matériau raréfié. On est pourtant loin de l'ascèse. Mais sans doute y a t-il ici plus de maturité, de profondeur, moins de virtuosité un peu clinquante, que parfois. Donc, chef d'oeuvre. Qui nous entraine dans le dédale architectural des sept églises imbriquées sans jamais nous laisser à la traine. Un parcours passionnant, entre les bruits de la foule de la place Santo Stefano, les antiphonies de piano que l'espace du concert sublime, les lumières vivement dorées de la crypte, les chorals de percussions qui, dédiés à Messiaen, commencent effectivement en chants d'oiseaux, mais qui se mécanisent se superposent et finissent plus par évoquer Xenakis, des rappels de thèmes précédents pour structurer l'écoute, et la fin en envol doux et pulsant. Vraiment magnifique.

Pierre Boulez - Rituel in memoriam Bruno Maderna

Entre les deux partitions, une notion de sacrée, sans doute. Mais ici les termes de sobriété et de matériau raréfié s'appliqueraient mieux. L'aspect spectaculaire, c'est la spatialisation. Pascal Rophé est installé sur une estrade au centre de la salle, et l'orchestre, EIC plus Orchestre du Conservatoire, éparpillé en ilots de tailles grandissantes tout autour de la salle. Il vaut mieux être à l'arrière, pour voir le chef, et les distinctions entre sections paires, ornées de force gongs, et fortement conduites par le chef en grands mouvements de bras pour être vu de tous, et sections impaires, où il ne fait que donner les départs, un percussionniste pour chaque ilot donnant le tempo local, avec forcément légers décalages. Cela crée un flux de temps très particulier, dans lequel on peut ou non entrer. Mais après "le sette chiese", l'austérité de cette pièce, malgré le jeu des couleurs, ne passe pas complètement.

Ailleurs: Carnets Sur Sol, Arthur chez Jean-Louis Foucart

Spotify:
Pierre Boulez dirige Rituel (attention, Spotify se trompe sur le nom des plages, l'ordre correct est 1/Eclat 2/Multiples 3/Rituel)
Mantovani chez Aeon : D'un rêve parti, Troisième round

vendredi 22 janvier 2010

Benjamin Britten - War requiem (Salle Pleyel - 20 Janvier 2009)

Voici donc le concert le plus populaire de mon abonnement, le seul où j'ai du changer de catégorie, celle visée étant déjà pleine. Comme le remarque un ex-illustre blogueur rencontré dans le hall, peu parmi les gens ce soir rassemblés, se défaisant au vestiaire de pesants manteaux et fourrures, accepteront de se perdre dans le XIXème, lors de l'avènement de la Philarmonie. Quoique la personne en tongues et bandana prophétisant la venue proche de la société gratuite tout en rejoignant sa place ...
Sur la scène élargie s'installe l'Orchestre de Paris, à qui la place gagnée sur les premiers rangs permet de s'étaler confortablement, en déplaçant certains musiciens pour tenter de reproduire la disposition particulière de la création de l'oeuvre, lors de l'inauguration de la cathédrale de Coventry. Au fond s'installe le choeur, hommes et femmes, mais où sont les enfants ? Ils ne sortiront de leur coulisse que lors des saluts.
Puis arrivent la soprano Indra Thomas qui se perche en hauteur près du choeur, tandis que les ténor Paul Groves et Matthias Goerne s'installent près du chef Ingo Metzmacher. Pour un tel effectif, l'orchestration est heureusement bien plus légère qu'on pourrait croire. Britten ne donne presque jamais toute la puissance possible. Il privilégie au contraire les changements de tons et d'écritures, ici un choeur presque seul, ici une sorte de quintet à cordes à peine accompagné. Tout cela est parfaitement interprété.
Question voix, Indra Thomas a du coffre, et de la puissance. Mais elle n'éveille en moi guère d'émotion. Alors que Groves et Goerne, autant en solo que dans leurs duos tissés de compassion et de douleur, sont profondément émouvants.
Comme souvent lorsque je découvre pour la première fois une grande pièce en concert, je suis un peu submergé, assommé, et ne profite pas entièrement du concert. Tant pis pour moi. Il arrive qu'un compositeur, en voulant créer une oeuvre avec message humaniste, devienne lourd et rate sa cible, façon "Kaddish" de Bernstein, ce n'est pas le cas ici (je remarque d'ailleurs que j'avais imputé l'échec du kaddish à un manque de cynisme - ici, il est bien présent !).

Ailleurs: Palpatine, ConcertoNet
Spotify:
La version historique, une autre avec des bons couplages.

samedi 16 janvier 2010

Borodine Chostakovitch Dutilleux Scriabine (Salle Pleyel - 15 Janvier 2010)

Alexandre Borodine : Danses Polovtsiennes du Prince Igor

Pour piloter l'Orchestre Philharmonique de Radio France, Lionel Bringuier, un chef de 23 ans au cursus impressionnant (actuellement Directeur musical à Valladolid, Chef associé à Los Angeles et en Bretagne - encore un bon consommateur de miles ...) a un peu de mal. Dès que les danses s'emballent, les pupitres ne sont pas en phase et se courent les uns après les autres. Et même quand la grosse artillerie est lancée, les fondations semblent fragiles. A croire que le morceau n'a pas été répété ...

Dimitri Chostakovitch : Concerto pour violoncelle n° 1

Gautier Capuçon a indéniablement plus de talent que sa coupe de cheveux pourrait le faire croire. Mais j'ai entendu des interprétations de ce concerto autrement captivantes. Les sections rapides manquent d'ironie et de cruauté, les sections lentes manquent de souffrance et de désespoir. Du coup, cela sonne un peu languide, avec du joli son, et des cadences bien exécutées, mais qui me laissent sur ma faim.

Henri Dutilleux : Métaboles

Voilà par contre du bel orchestre ! Impeccables passages d'un pupitre à l'autre, ça frétille, ça pulse, ça flotte, en fonction des climats à suggérer, ils sont inspirés, et moi aspiré le long de ce gros quart d'heure enchanteur. C'est la pièce qui m'a fait découvrir Dutilleux, et cette interprétation lui fait honneur. Un grand plaisir.

Alexandre Scriabine : Poème de l'extase

J'ai du mal avec Scriabine. Et cet opus ne fait pas exception, extatique soit mais comme tenant un discours d'illuminé limite hystérique, avec de gros passages orchestraux qui se brisent d'un coup, et une construction tonale qui me laisse plus qu'indifférent, bref, j'attends que ça passe ...

Ce concert est disponible en vidéo sur LiveWebArte.

Ailleurs: Palpatine

Spotify:
Chostakovich : Concertos pour violoncelle par Truls Mork,
Dutilleux : Oeuvres pour orchestre par Michel Plasson

lundi 11 janvier 2010

Wagner Stravinski (Salle Pleyel - 9 Janvier 2010)

Richard Wagner - Siegfried-Idyll

J'aime décidément cet orchestre, le Budapest Festival Orchestra, dirigé par Ivan Fischer. Les cordes sont d'une grande précision, et les couleurs méticuleusement travaillées. La musique qui s'installe dans un tempo plutôt lent (incise : avec Spotify, je vois que Toscanini le jouait en 16:04, et Glenn Gould en 24:29 !) devient délicieuse quand sonnent les bois, installés au premier rang face au chef. Cela manque peut-être d'épanchement romantique, mais quelle poésie sonore, dans des climats un peu éthérés. Excellente flûtiste.

Richard Wagner - Wesendonck-Lieder

L'orchestre est un merveilleux accompagnateur, qui ici sert d'écrin à la voix de Petra Lang, qui ne faiblit qu'à de rares instants, et offre une interprétation d'une grande hauteur et d'une impériale tenue. Lorsque sonnent les cinq accords de "Im Treibhaus", j'ai du mal à reprendre souffle. Vertige, envoutement, suffocation. Les deux derniers lieds me permettent de regagner terre en douceur.

Igor Stravinski - Petrouchka

Dans cette grosse demi-heure, Fischer privilégie la précision des détails, ce qui convient parfaitement à cette suite de moments sans grande unité. Harpe, célesta, piano, flute, beaucoup de musiciens ont leur petit moment de gloire, et cela fait une musique qui crépite d'intensité et d'inventivité orchestrale, tout en restant légère (c'est pas encore le Sacre).
Une excellente soirée, un brin courte, que je quitte avant le Bis.

Ailleurs : ConcertoNet

Spotify:
Les Wesendonck-Lieder, par Anne Schwanewilms accompagnée au piano, par Dame Felicity Lott accompagnée d'un quatuor, par Christa Ludwig accompagnée d'un orchestre.
Et Petrouchka, version orchestre dirigé par Bernstein, ou version réduite pour piano.

dimanche 3 janvier 2010

Cinéma 2009

Une année qui m'a semblé plus contrastée que la précédente, avec plus de films que j'ai beaucoup aimés, et plus que j'ai parfaitement détestés.

Louise-Michel + ; Morse + ; Benjamin Button - ; The Wrestler + ; Gran Torino ; Watchmen + ; Welcome - ; Les 3 Royaumes + ; Duplicity - ; Cheri ; Les 16 de Basse-Pointe ; OSS 117 : Rio ne repond plus ; Dans la Brume électrique ; Still Walking + ; Coco avant Chanel ; Ponyo sur la falaise + ; Star Trek ; Vengeance ; Looking for Eric ; Etreintes brisées + ; Terminator Renaissance - ; Les Beaux gosses ; Jeux de Pouvoir ; Coraline + ; Public Enemies ; Bancs Publics -; Harry Potter et le Prince de sang mêlé ; La-Haut ; Inglourious Basterds ; un Prophete + ; District 9 ; Rien de Personnel ; Le Ruban Blanc + ; Clones ; A l'Origine + ; In the Loop ; Vincere + .

Planning Janvier - Février 2010

Entre la trêve des confiseurs et les vacances d'Hiver, une forte concentration sur Pleyel !

Je signale que le concert "Mantovani / Boulez" est sans doute la meilleure occasion de l'année pour s'initier à la musique contemporaine (oeuvres majeures mais accessibles ...). S'il reste des places ...