samedi 27 février 2010

Le CNSM invite François Jeanneau (Mairie du 4ème - 25 Février 2010)

Chaque dernier Jeudi, le Laboratoire de la création propose un concert de Jazz gratuit à la mairie du 4ème arrondissement de Paris. Première fois que je m'y rends, et découvre cette salle de bal, pas forcément idéale pour écouter de la musique, rapidement pleine, avec un public où se mêlent amateurs de Jazz et curieux néophytes. S'installent sur la scène les jeunes musiciens du Conservatoire National Supérieur de Musique, des élèves donc, et François Jeanneau, ici dans le rôle de chef d'orchestre SoudPainter. L'heure de concert sera d'un bloc, enchainant différents types de séquences, certaines très dirigées où Jeanneau par quelques signes indiquent les changements requis de hauteur, de vitesse, de densité, certaines beaucoup plus libres, où le chef une fois indiqué qui doit jouer se met sur le coté pour les laisser s'exprimer. Dans cet ensemble, tous ne sont pas au même niveau, le guitariste semble incapable de savoir quoi jouer, le saxophoniste soprano au contraire déborde de vitalité à chaque intervention. Je me rends compte sur le tard qu'il n'y a aucun micro, le son est donc direct sans amplification (à part la guitare électrique et le violon). Le tout donne un concert sympathique, intéressant dans le cursus de formation des élèves, mais en rien inoubliable ...

Ailleurs : Quelques photos sur Flickr

dimanche 21 février 2010

Hofesh Shechter - Uprising / In your rooms (Théâtre de la Ville - 19 Février 2010)

Uprising

Sur la scène vide s'avancent bien alignés sept danseurs d'un, ma foi, fort beau gabarit, qui se lancent illico dans une belle démonstration d'énergie, en mouvements tortueux mais en trajectoires limpides, pleines d'évocations pèle-mêle animales, tribales et urbaines, entre luttes et accords, tensions et supports, violences et fraternités, brutalité et, si si, sensualité virile. La musique, en bonne part composée par Hofesh Shechter, est forte et franche. La lumière habille les événements sans fioritures. Rien de révolutionnaire dans cette gestuelle souple et musclée, mais une belle occupation de l'espace scénique en petits groupes qui se recombinent, et un grand plaisir à les voir évoluer, s'affronter, briller dans quelques solos et duos, pour finir regroupés en une sibylline parodie révolutionnaire.

In your rooms

C'est clairement le même langage, qui cite par moments la première pièce. Mais tout est augmenté, comme en version luxe. La musique est jouée en direct par des musiciens installés sur une estrade. Les garçons sont rejoints par quelques filles, qui apportent des mouvements plus visiblement issus de la danse classique, mais qui font preuve de la même puissance physique dans les martelages du pied et brandissages du poing. Je remarque en particulier Yeji Kim, au jeu de jambes ample et intense. Il y a aussi du texte, une sorte de voix-off hésitante et professorale. Enfin, les jeux de lumière sont beaucoup plus sophistiqués, qui créent des mini-scènes indépendantes, où entrent et sortent les danseurs pendant des fondus au noir, ce qui donne une illusion cinématographique de montage de scènes aux ambiances et aux allures très différenciées. Tout cet appareillage n'est pas forcément très utile. La force de cette danse est son immédiateté, sa lisibilité, le plaisir évident qu'elle dégage. Son défaut est une certaine absence d'enjeu. En se contentant de compliquer la scénographie, cette troupe enthousiasmante risque de n'être que spectaculaire.

Deux vidéos, pour les deux parties :





Et un reportage d'Arte :


Festival Movimentos 2009 (H.Shechter)
envoyé par maneb40. - Films courts et animations.

Ailleurs : Aligateau, Danse d'aujourd'hui

mercredi 10 février 2010

EIC - Orientalisme (Cité de la Musique - 9 Février 2010)

Toru Takemitsu - Rain Tree

Deux marimbas et un vibraphone pleuvent des notes pendant 10 minutes en variant les attaques, les baguettes, et les couleurs, mais dans le discours très morcelé pas grand-chose ne me plait vraiment, sauf quand le rythme s'approche parfois des boucles de Steve Reich ...

Ondrej Adamek - Noise

Le jeune compositeur, assis devant moi, s'étonnera beaucoup du rendu de sa pièce, créée ce soir, et dont il n'a pas reconnu certains passages ! Il doit être en effet assez ardu de prévoir le résultat de ces manipulations orchestrales, où il multiplie les jeux hétérodoxes, froissement chiffonné de la harpe, vrombissement divers, éructations essoufflées des vents, le tout pour rendre, de manière assez convaincante, les modes de vocalisations des arts traditionnels japonais, Nô, Bunraku, manifestations religieuses. Ponctuée de vrais cris des musiciens, la pièce est volontiers spectaculaire et souvent drôle, même si ce feu d'artifices d'effets finit par me sembler un peu ... artificiel.

Gustav Mahler - Das Lied von der Erde (version Schoenberg / Riehn)

J'aime beaucoup cette version réduite du Chant de la Terre. Comme j'y ai toujours particulièrement apprécié les moments "de chambre", ici je suis servi ! Délicieuses mélodies à la flute et au hautbois, interventions vigoureuses ou délicates du piano, extraordinaire ligne de violon au début du 2 ... Les effets de masse passent bien sur moins. De fait, je laisse passer les mouvements 3 à 5 pour me plonger dans l'Abschied, qui commence au piano, lugubrement lumineux. Superbe cantatrice, Lilli Paasilki. Le ténor, Daniel Kirch, comme souvent focalise moins l'attention. Susanna Mälkki, qui avait démarré trop vite, conduit ensuite son monde avec une gestuelle ronde et élégante, et impose un silence final à la salle d'une impressionnante durée.

Ailleurs: Zvezdo, ConcertoNet

Spotify: Le Chant de la Terre dans une version historique, une version de chambre, une version pour piano et voix, et une version chantée en chinois.
Et de la percussion japonaise.

lundi 1 février 2010

Lemi Ponifasio - Tempest : Without a Body (Théâtre de la Ville - 30 janvier 2010)

Des affichettes dans le hall prévenaient : le volume sonore serait élevé durant la première minute. Mais quand les lumières d'un coup s'éteignent et que rugissent les turbines à faire trembler les sièges, le sas sensoriel est quand même brutal. On se retrouve ensuite face à une sorte de cérémonie, peut-être exorciste, obscur aussi bien d'un point de vue visuel (la scène est assez peu éclairée, ce qui permet au monolithe planant au-dessus du sol de découper de belles formes d'ombres, et ce qui donne lieu à une étonnante et vaguement angoissante apparition de mains et de têtes sans corps avant qu'ils ne s'avancent), que par rapport à la compréhension du discours. Le livret explique heureusement comment appréhender cet ange hurleur qui erre hagard : il fallait connaitre l'interprétation que fit Walter Benjamin du tableau "Angelus Novus" de Paul Klee ... C'était pas évident ... De même pour le grand portrait projeté d'un homme arrêté pour soupçon de terrorisme ... Et les choses s'aggravent lorsqu'un politicien indépendantiste samoan récite un discours sur la condition de son peuple, en samoan, non traduit, et que lui répondent depuis la salle des spectateurs, que seule la lecture du Monde permet de savoir envoyés par l'ambassade à Paris de la Nouvelle-Zélande !
Passés ces éléments laissés par le chorégraphe volontairement incompréhensibles (de l'étranger qui reste délibérément étranger), et quelques passages qui auraient pu être fortement raccourcis (la ronde à quatre pattes, principalement), il reste un spectacle volontiers fascinant, où des hommes à l'allure de moines guerriers glissent sur le sol en pas chassés et moulinent des bras en claquant des mains et parfois murmurant, où un homme quasi nu rampe sur une table vitrée, où un autre finit par se briser du parpaing sur la tête pour finir sur une image de désolation, sol couvert de gravats sous un monolithe dangereusement penché et teinté de sang.



Ailleurs : Libération, Le Monde, Laula