mardi 31 mars 2015

Youn Sun Nah Quartet (Théâtre du Châtelet - 23 Mars 2015)

Le théâtre est bien plein et le public enthousiaste (un peu trop, se laissant piéger et applaudissant plusieurs fois lors de baisses d'intensité au milieu de chansons), lorsque, après une rapide mais pertinente présentation par l'hôte des lieux, Youn Sun Nah entre sur le plateau chichement décoré de quelques lampes sur pied, toujours aussi humble, et accompagnée de Vincent Peirani, pieds nus et accordéon en bandoulière. Premier morceau : "Voyage". Et c'est bien ce qu'elle va nous proposer, de voyager à travers des émotions contrastées, soufflant alternativement chaud et froid. Les deux autres compagnons les rejoignent, Ulf Wakenius à la guitare et Simon Tailleu à la contrebasse, pour "Uncertain Weather" et sa tension douloureuse. Ulf Wakenius prend un solo hésitant ; au cours de la soirée, il me semblera plusieurs fois un peu flotter, rattrapé par un Vincent Peirani par contre absolument impérial. Puis vient le premier inédit (sur disque) de la soirée, "A Sailor's Life", Folk song anglais. Suivi de "Mistral", l'occasion d'un jubilatoire exercice de souffle, en souvenir d'un Avignon trop venteux. Mais le premier choc de la soirée c'est "Empty Dream". Vincent Peirani y déploie un solo prodigieux, tout en émotion rentrée, accompagné d'un Simon Tailleu minimaliste et essentiel, qui semble guider note à note, pas à pas, l'accordéon, à travers l'obscurité et le silence, vers la sortie d'un labyrinthe. Les respirations s'arrêtent dans la salle, de peur d'être trop bruyantes, jusqu'à ce que la contrebasse, en simplement reprenant un tempo plus vif, marque la fin de l'épreuve. Et comme la soirée joue sur les contrastes, Youn Sun Nah enchaîne avec "Pancake", une version totalement déconstruite et un peu trop foutraque à mon gout, où un extrait de bal musette se voit adossé à un passage très rock, et où la gourmandise joyeuse se perd. "Lament", ses "I am not ready" et sa sensibilité à nue, remet l'émotion au centre, apaisée par l'autre inédit, un autre Folk song (indication pour le prochain album ?), suédois cette fois ("Vem kan segla förutan vind?" je recopie de la playlist d'un autre concert). Le coté lumineux et joyeux revient avec "Ghost Riders in the Sky"et son accent de cow-boy au coin du feu racontant son histoire héroïque et invraisemblable, puis "Memento Magico" et ses virtuosités estomaquantes. De là, retour à l'émotion : c'est "Arirand", chanté en Coréen, après qu'elle nous ait indiqué que ses parents ont fait le voyage ce soir pour la voir à Paris ; et ils saluent, et on les applaudit.
En bis, elle revient en solo, et propose "Calypso Blues", démonstration formidable et magnifique de re-recording en direct, où elle superpose des boucles en les chantant sur un micro séparé (le mieux, c'est de regarder la vidéo).
Enfin, en vrai dernier morceau, elle ne brise plus le coeur des spectateurs comme à une époque en terminant par "Avec le temps", mais au contraire nous laisse sortir tout enivrés et joyeux d'un "Jockey full of Bourbon".
Et bien sur, est-il utile de le préciser, tout au long du concert, la voix magique de Youn Sun Nah, sa capacité à lui faire prendre tant de couleurs différentes, à chaque fois au service de la chanson, et sa gestuelle amusante de Sound Painting, mimant pour elle-même les mouvements de la musique.

youn sun nah quartet

Ailleurs : J'ai cru comprendre que la vidéo de la soirée sera disponible sur Arte Concert. Attendons un peu donc ...
Spotify : "Lento" de Youn Sun Nah, "Vagabond" de Ulf Wakenius

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